Tony n´était pas une ordure, loin de là. C´était même quelqu´un de bien: à la fois travailleur exemplaire, père de famille responsable, conjoint serviable; il savait se montrer prévenant et prévoyant. D´ailleurs, il prenait “garde” à tout, assurant aussi bien la garde des enfants à domicile, la garde rapprochée de sa femme que l´approvisionnement du garde-manger.
Seulement, à force de tout garder pour lui, les choses s´étaient gâtées. Son amour conjugal se trouvait déjà en état de décomposition avancée. Après l´époque initiale des roses rouges, il fallait surmonter celle du “pot pourri”: car bien sûr l´amour était encore dans l´air mais son parfum n´avait ni la fraîcheur ni le naturel d´antan. Tony l´avait senti; malgré les apparences, tout était dénaturé, aussi mort que des fleurs séchées!
Cette idée morbide commençait vraiment à l´embarrasser. Pourtant il ne laissait rien transparaître. Le secret était jalousement gardé dans sa boîte crânienne. Il avait décidé de vivre avec. Coûte que coûte. Et visiblement, sa cachotterie portait ses fruits:
Il incarnait à la perfection l´archétype de l´homme sans histoires, heureux en famille et en ménage. Son voisin s´extasiait devant tant de bonheur et ne manquait pas de lui rappeler à chaque occasion: “mon vieux, t´as gagné le cocotier, toi…!” Alors Tony souriait en pensant à l´incongruité de ce cadeau en milieu tempéré.
FRED DETTWILER
-La fiche pédagogique: À SA DECHARGE-FP
-les réponses…: À SA DECHARGE-FPC
ON VA PAS EN FAIRE UNE HISTOIRE 